Hugo JACQUINEZ

Diapositive créée à la main, projetée et photographiée

Diapositive créée à la main, projetée et photographiée

Tirage négatif de la diapositive

Tirage négatif de la diapositive

Cette production a été imaginée et conçue lors d’une séance d’expérimentations collectives autour du thème de la lumière et des couleurs.

Le processus d’élaboration de cette production s’est déroulé en plusieurs temps. Il y eu d’abord la création de la diapositive à l’aide des matériaux sus cités. Une projection murale a ensuite servi de support à une photographie qui a permis de fixer une représentation de la diapo encore mouvante puisque les encres, pas encore sèches, évoluaient  et se mélangeaient entre elles de façon aléatoire. Puis, la troisième étape, décalée dans le temps, a été le tirage négatif noir et blanc de la diapositive couleur. Le décalage temporel explique les différences de forme et d’aspect à certains endroits. En effet, lors du tirage à l’agrandisseur, l’encre était sèche et donc l’image figée dans une forme non conservée par la photographie.

Cette production évoque et invoque différents procédés photographiques : la diapositive, la photographie argentique et la photographie numérique. Le résultat est un hommage à la photographie et une réhabilitation de techniques considérées aujourd’hui comme obsolètes.

Supports :

–         Cadre de diapositive

–         Feuille de rhodoïd

–         Papier photo 10×14

Matériaux :

–         Encres

–         Pigments

–         Fil à couture

–         Pellicule cinématographique

Outils :

–         Ciseaux

–         Pinceaux

–         Appareil photo

–         Projecteur de diapositives

–         Produits de tirage argentique

Processus :

1. Sur une feuille de rhodoïd découpée au format d’une diapositive ont été posées aléatoirement quelques gouttes d’encres rouge, ocre et noire. J’ai ensuite prélevé sur un film 35mm les bandes de pellicules qui permettent au film de se dérouler. Je les ai ensuite disposées sur le rodhoïd encré de manière à former un cadre qui évoque l’aspect d’un morceau de pellicule intact. Avant d’enfermer ce montage entre deux feuilles de rhodoïd et un cadre de diapositive, j’ai disposé un morceau de fil de couture entre les deux bouts de pellicule. La compression entre les deux feuilles a créé un étalement et un mélange des couleurs qui a suffit à métamorphoser ma composition et à laisser y intervenir le hasard.

2. J’ai projeté la diapo sur un mur blanc et granuleux et procédé à la prise de vue. Pour ce faire j’ai utilisé un appareil reflex numérique installé sur un trépied qui m’a permis d’atteindre une bonne netteté. Le trépied était indispensable car la seule source de lumière présente étant celle du projecteur à diapo, le temps de pose a duré 1/15s. Malgré la faible luminosité j’ai tenu à conserver une faible sensibilité (100iso) qui ne rajoute pas de grain à une texture déjà chargée.

3. Puis j’ai développé la diapositive créée de la même façon qu’un négatif argentique et obtenu ainsi une inversion des valeurs. A la manière d’un photogramme remanié, l’impression donne un rendu abstrait évoquant une radiographie par sa sensation de transparence.

Démarche :

Il s’agissait de pouvoir expérimenter différents procédés photographiques, de jouer avec la lumière.

Fabriquer une diapositive à la main m’a permis d’aborder différentes formes d’écriture de la lumière : la diapositive (image révélée en positif), le développement d’un film (inversion des valeurs d’une image), la projection d’une vue (à la façon de la lanterne magique). Sur un très petit format (35 mm x 25 mm), j’ai composé une image abstraite à partir de fragments de matériaux.

Le terme diapositive est apparu en 1892 avec la commercialisation des plaques de lanterne magique, ancêtre du projecteur de diapositives. A l’époque, des images étaient peintes sur des plaques de verres et constituaient l’objet diapositive. Aujourd’hui, le support de la pellicule, tant cinématographique que photographique, devient peu à peu dépassé face aux technologies numérique. J’ai choisi de travailler avec la pellicule comme support de mémoire avec l’idée de retour, pour parvenir à une hybridation des deux technologies. La confrontation des supports ancien et moderne crée une sorte de montage temporel. En observant la production finie, j’y ai retrouvé des évocations de différentes périodes de l’Histoire de l’Art: la peinture rupestre (dans les tons ocres et l’aspect schématique de la forme créée par le fil), le vieillissement des pigments et vernis d’anciennes peintures (dans l’aspect craquelé), ou encore le grain et les imperfections des premiers tirages photo.

Enfin, je trouve qu’il ressort également de cette production un aspect sédimentaire né des couleurs chaudes et de la confusion parfois « crasseuse » des couleurs et des matières.

 

Pistes pédagogiques :

Une pratique photographique et l’utilisation d’un labo de développement sont des outils formidables pour la classe. Il permet d’aborder des notions transversales qui brassent le programme :

–         La chimie, avec l’utilisation des produits de développement.

–         La physique, en particulier l’optique avec la prise de vue qui nécessite des connaissances sur le trajet de la lumière.

–         Les mathématiques, avec les calculs de rapports entre l’ouverture du diaphragme et la durée du temps de pose.

–         L’Histoire et l’Histoire de l’Art grâce au patrimoine artistique photographique  et à l’aspect mémoriel de ce support.

–         Les Arts Visuels. De la création d’une diapo au tirage d’un négatif, le champ photographique est infini en arts visuels. De très nombreuses techniques peuvent être employées comme le grattage, la peinture, l’encre, le découpage, le collage, la surimpression. De la représentation abstraite à la vision naturaliste, la photographie offre une palette extrêmement large de possibilités créatrices.

Œuvre de référence :

L’œuvre que j’ai sélectionnée en référence à ma production est une rayographie de Man Ray intitulée Rayographie film enroulé (1923). Ce terme est un néologisme créé par le photographe surréaliste. Il est le synonyme de photogramme et désigne ceux faits par Man Ray. Il en en donne une définition : « une photographie obtenue par simple interposition de l’objet entre le papier sensible et la source lumineuse ». Le processus consiste à déposer des objets (des rouleaux de pellicule dans l’œuvre choisie) sur du papier à impressionner afin d’en dévoiler les contours qui peuvent être détournés de leur aspect premier. Le tirage en négatif de la diapositive est proche de ce procédé même si les objets sont insérés dans le support.

 

Man Ray, 1923

Titre: Rayographie  films enroulés

Dans son autobiographie, Man Ray décrit son invention du rayogramme en 1922 comme un acte automatique, inconscient, étant fidèle en cela à la mouvance surréaliste.

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